3.     Cela vient des Blancs

 

Un peu dans la continuité du précédent argument qui indique que ces pratiques étaient absentes de nos traditions, un autre argument consiste à dire « cela vient des Blancs ». Cet argument est légèrement différent du précédent car il révèle un léger parfum de xénophobie, voire de racisme qui mérite qu’on lui accorde sa rubrique.

Dire cela vient du Blanc sous entend deux choses : la première est que ça ne vient pas de chez nous, mais du Blanc, et la seconde, latente est que ce qui vient du Blanc est forcément mauvais. Comme nous en avons pris l’habitude, analysons :

Commençons par le second point : Ce qui viendrait des Blancs aurait de très grandes chances d’être un mal (puisque c'est un argument à part entière). Ce sentiment est sans doute justifié par les séquelles du colonialisme et le joug du néocolonialisme tel que vécu par beaucoup. Le sentiment de supériorité et même le racisme que beaucoup attribuent aux Blancs envers les Noirs n’y sont sans doute pas étrangers. Le fait qu’on attribue à la race blanche une absence des valeurs fondamentales dites « africaines »  (manque d’hospitalité, de respect des ainés, etc.) non plus. On peut sourire en observant les sociétés africaines, et particulièrement camerounaise à l’évocation de ces valeurs. Toujours est-il que la logique est que le Blanc est un danger. On se demande alors où passe cette logique, quand à tour de bras, on encourage nos filles à chacune trouver « son Blanc », quand la mode et la culture du même Blanc est singée, et ce dans toutes les strates de la société quand on la trouve agréable (style vestimentaire, course à l’arment électroménager, musique écoutée, vacances en Europe, et même comme nous l’avons vu, exigence de démocratie manifesté par le recours aux puissances occidentales quand on se trouve brimé dans son pays, etc.). On est donc ramené à une hypocrisie quand on invoque cet argument. Hypocrisie qui dévoile le fait que tout le monde est d’accord que l’être humain a le droit d’avoir des aspirations, qu’il soit noir, blanc, jaune ou rouge. Ce n’est pas parce qu’on est Blanc que ce qu’on fait est mal, pas plus que bien d’ailleurs, mais il convient d’analyser l’action en elle pour dire si et en quoi elle est un mal nécessitant la prison. Ce que les tenants du « cela vient des Blancs » ne font pas lorsqu’ils parlent d’homosexualité.

 

L’autre point mentionnait que l’homosexualité était une fabrication des Blancs. Nous avons déjà montré que des pratiques homosexuelles sont présentes dans certaines traditions africaines, preuve que l’influence des Blancs n’a pas été nécessaire. En effet, dans toutes les cultures, on retrouve ce genre de pratiques. L’extrait qui va suivre et que l’on retrouve dans les articles déjà cités indique même qu’à une époque, certaines personnes ont attribué l’origine aux populations arabo musulmanes, populations dont la culture a imprégné toutes régions aujourd’hui musulmanes d’Afrique.

D’autres auteurs de cette époque iront jusqu’à situer l’Afrique Subsaharienne hors de la zone sotadique (sotadic zone)12, qui semble être la zone présumée indigène où se vivait l’homosexualité loin du Sud du Sahara en Afrique (l’Afrique maghrébine laquelle aurait influencé entre autres, la côte est africaine, car dans cette zone précisément, l’origine de l’homosexualité est attribuée par les natifs à l’influence arabo-musulmane13).

Pourtant les musulmans ne sont pas les derniers pour aujourd’hui dire que l’homosexualité est exogène a leur culture.

En outre,  et dans l’immense majorité des cas, la morale des peuples a toujours été opposée à l’homosexualité. Ceux qui s’inspirent de la bible, et qui veulent en respecter les traditions, y trouveront les interdictions de l’homosexualité (preuve que ça existé à l’époque). L’observateur de bonne fois, notera que quasiment tous les systèmes juridiques du monde ont condamné, comme c’est le cas actuellement au Cameroun, l’homosexualité. Actuellement, aux Etats-unis, en Europe, des brigades d’homophobes existent encore, reprenant les mêmes arguments religieux et traditionnels qu’au Cameroun, luttant contre le mariage gay ou l’adoption par les gays. Ce qui s’est passé dans ces pays pour qu’il y ait dépénalisation, c’est que la notion de liberté individuelle a primé sur la morale et les traditions. Et c’est cette même notion que nous invoquons quand nous réclamons la démocratie, la liberté d’expression, l’égalité homme femme ou la liberté d’entreprendre. Soyons donc cohérents jusqu'au bout.

Dire donc que ça vient des Blancs est faux. De même que dire que puisque ça viendrait des Blancs, c’est un mal. Il faut donc continuer l’analyse des autres causes pour déceler le mal qui nécessiterait une loi qui envoie des gens en prison.

 

4.     Extinction de la société (mimétisme)

 

Un autre argument utilisé, mais de manière légère et inconsidérée est celui selon lequel si on laisse les homosexuels faire, tout le monde finira par devenir homosexuel, et la société s’éteindra. Quelques réponses rapides.

Premièrement, , nous sommes sans ignorer que les homosexuels ne voient pas leurs capacités reproductrices enlevées. Ils peuvent donc être homo (ou avoir des pratiques homos comme c'est le sujet) et avoir des enfants. Il y en a pas mal. Et même si ça ne passe pas par l'amour, les éprouvettes peuvent faire l'affaire. Tout le monde peut se renseigner sur le nombre de couples homos qui veulent être parents (avec des débats de société sur l'adoption des homos et bientôt sur la fécondation in vitro et autres). Donc même si tout le monde devenait homosexuel, la survie de l’espèce n’en serait pas plus menacée. Mais cela n’arrivera même pas.

En effet, dans aucun pays au monde ayant libéralisé l’homosexualité, celle-ci n’a vu le nombre « d’adeptes » monter jusqu’à menacer le nombre d’hétérosexuels. En général la proportion d’homosexuels dans la société se stabilise à environ 10%. Ce qui se passe, c’est que dans une société liberticide,  beaucoup sont homosexuels sans le reconnaitre par peur du regard des autres ou des représailles. Dès lors que l’interdiction saute, il est donc naturel qu’un grand nombre de ces « frustrés » se révèlent au grand jour (coming out). Mais le nombre réel d’homosexuels n’augmente pas. Même dans la société grecque antique qui ENCOURAGEAIT les pratiques homosexuelles sous certaines conditions, l’extinction de la société n’a jamais été une inquiétude.

En effet, et c’est là la seconde réponse, montrez moi du doigt un seul hétérosexuel (un vrai, qui n’est pas homo refoulé) qui dira « si on légalise ça, je deviendrai homosexuel ». il n’y en a pas. Quelle raison aurait un hétérosexuel de devenir homosexuel parce qu’il a vu les autres faire ? Pourquoi les homosexuels qui sont infiniment moins nombreux, ne deviennent ils pas hétérosexuels à la vue de tous ces hétérosexuels ? Quand on tient des propos sur la menace de la société, c’est toujours les autres qui sont susceptibles de devenir homosexuels, jamais soi même. Quelqu’un qui se dit hétérosexuel et qui à la première occasion deviendrait homosexuel était il vraiment hétérosexuel ? Et si l’on a donc ce genre de craintes c’est donc qu’on pense que la société est remplie d’homosexuels qui s’ignorent, et si l’on pense cela, c’est que l’on craint soi même d’en être un (échantillon représentatif).

Psychologie à deux balles ?  Pas sûr. Réfléchissez-y, et pendant ce temps continuons d’explorer s’il existe de réelles causes justifiant que les pratiques homosexuelles soient un mal méritant la prison.

 

5.     Sectes des puissants

Un autre argument, relativement particulier à la société camerounaise (ou africaine en général), est basé sur la rumeur selon laquelle les homosexuels ce sont tous les dirigeants  de grosses sociétés et les ministres de la république, car c’est bien connu, « il faut donner son derrière pour réussir ». Ils sont tous dans des cercles ésotériques secrets, où on leur exige l’homosexualité. Et si vous voulez décrochez un boulot, il vous faut donc vendre votre dignité. Ce genre d’argument fait mouche dans une population pauvre et rencontrant un chômage endémique. Mais à bien y regarder de près, quelle considération un tel argument mérite t’il ?

Analysons. Premièrement, dans les sociétés, à forte misère sociale côtoyant néanmoins une minorité très riche, les rumeurs sur les moyens illégaux ou ésotériques (dans les sociétés croyant à la sorcellerie par exemple) utilisés par icelle ont toujours existé. Les rumeurs sur tel ou tel qui pour réussir aurait « mangé » sa famille existent et continueront sans doute. De même celles qui placent tel ou tel de manière certaine dans la rose-croix où des choses pas catholiques se déroulent. Il n’est donc pas étonnant que le peuple véhicule de tels fantasmes sur ses dirigeants. Mais évidemment, aucune preuve n’est avancée. On peut se demander comment si ces réunions sont secrètes, le vulgum pecus est il au courant. On peut se demander pourquoi ces dirigeants de la classe politique tiennent les mêmes discours homophobes que la population. On peut se demander pourquoi les journaux qui se sont hasardés à affirmer cela ont tous été condamnés lorsque les accusés ont porté plainte pour diffamation. On peut se demander pourquoi de tous les homosexuels qui croupissent en prison, aucun n’est de la haute, alors même que certaines personnes de la haute croupissent en prison pour d’autres méfaits tels la corruption. On pourrait se demander pourquoi lors du reportage évoquant les homosexuels au Cameroun récemment diffusé sur arte, la communauté homosexuelle était composée de personnes normales soumis aux mêmes maux, désirs et envies que le reste de la population camerounaise. On pourrait répondre à ces questions « parce que c’était des histoires ». Mais le peuple dans sa frustration y croit. Encouragé il est vrai aussi par des cas comme celui du jeune Djomo Pokam où on a pu avoir l’impression que certains de la haute ont été couverts.

Le peuple donc y croit, mais certainement sans preuve en attendant d’en avoir. Que reste-t-il alors ? Le problème du fait qu’il faille « donner son derrière » pour avoir un poste. Là encore, une telle affirmation ne relève que d’un examen rapide.

Comme nous l’avons dit plus haut, nous pensons que dans toute société, il y a naturellement un certain pourcentage d’homosexuels, affirmés ou refoulés, de même que de personnes ayant des pratiques homosexuelles. Il y en a donc logiquement aussi dans la classe dirigeante du pays. Ceci étant une déduction logique. Par contre ce qui n’est pas une déduction, mais une observation indéniable, est que à chaque échelon de pouvoir, l’homme (ou la femme) essaie d’abuser de son pouvoir. C’est pourquoi il n’est pas rare, et même très fréquent de voir des professeurs d’universités qui monnayent les notes contre services en nature, de voir des directeurs qui font du chantage sexuel lors d’entretien ou du harcèlement sexuel à leurs collaboratrices.

Le mot est lâché : harcèlement sexuel. Qu’un patron exige d’un homme qu’il reçoit du sexe pour lui donner un poste, c’est exactement la même chose que s’il l’avait exigé à une femme. Vu le pourcentage dont je parlais plus haut, il y aura donc infiniment plus de femmes soumises au harcèlement sexuel que d’hommes (de la part de patrons masculins). Il est donc étonnant que ce soit le harcèlement d’hommes qui fasse l’objet de rumeurs. A se demander si la société trouve normal que les femmes soient exploitées sexuellement, voire forcées à se prostituer (ie vendre ses faveurs contre un avantage) mais inacceptable dans le cas des hommes. La prostitution ou le chantage au sexe sont ils dans « nos traditions » ou dans nos religions ?

Si elles y sont, il ne faudrait donc pas se fâcher que les hommes y soient forcés, et si elles n’y sont pas, il faudrait attaquer le problème qui est, non pas l’homosexualité, mais le harcèlement sexuel, dont les femmes sont victimes en nombre infiniment plus grand que les hommes.

Messieurs et dames, combattons donc ensemble le harcèlement sexuel si vous êtes d’accord. Et continuons d’observer les autres causes qui justifieraient que les pratiques homosexuelles sont un mal méritant la prison.

6.      Ce n’est pas naturel

 

Il reste des arguments comme quoi ça n’est pas naturel, les animaux ne le faisant pas.

Premièrement je demanderais pourquoi prendre les animaux pour définir le naturel ? Pourquoi pas l’homme ? Or il est indiscutable que certains hommes naissent homosexuels (peut être que d’autres le deviennent). C’est donc que c’est naturel.

Deuxièmement, il suffit de taper « homosexualité animale » sur google pour se rendre compte que des animaux, dont certains très proches de l’Homme comme le singe Bonobo, ont des pratiques homosexuelles.

Troisièmement, puisque les animaux (et cela est avéré) ne boivent pas d’alcool (naturellement), il faut donc interdire toutes les liqueurs douces ou moins douces qui nous mettent en haut au bar, à la maison, en boite, au restaurant, etc…

Personne n’y pense, non ? Quel mal donc ?

 

7.      C’est la porte ouverte à la pédophilie

 

Un autre argument consiste à faire l’amalgame entre les pédérastes (homosexuels) et les pédophiles. Comme les autres arguments, il ne résite pas à l’examen.

Dans un cas, ce sont des adultes consentants, dans l’autre ce sont des enfants violentés. Les viols de fillettes se passent tous les jours dans nos familles, et se sont toujours passées. Sans attendre que les « Blancs » nous apportent l’homosexualité. Bon nombre de pédophiles s’attaquent aux gamines par des orifices que les homosexuels ne connaissent même pas. Peut être y a til des homosexuels pédophiles, mais il y a certainement, et beaucoup plus, de pédophiles hétérosexuels, parfois mariés et pères de famille.

 

En conclusion, après analyse, il ressort qu’aucun mal n’a pu être identifié dans les pratiques homosexuelles. Aucun mal qui serait du ressort de la loi. J’ai pu me tromper, mais alors il faudrait pour me le montrer identifier des causes que j’aurais oubliées (je me ferai un plaisir de les analyser) ou alors pointer les failles dans les analyses des différentes causes que j’aurais faites.

En attendant donc, aucun mal n’a pu être identifié qui obligerait, des gens qui n’ont rien fait à personne à aller en prison. Pour des pratiques que même certains hétérosexuels font tous les jours : sodomie, fellation, etc… Ceux là ne sont pas menacés. Non.

Je veux bien croire que des gens trouvent cela dégoutant, incroyable, impensable dans un monde normal, mais tous ces adjectifs relèvent du goût personnel. Il y a certainement des choses que chacun de nous fait, mais que d’autres personnes trouveraient impensables, dégoutantes, etc. je citerais l’adultère, la consommation d’alcool, le fait de manger des chenilles, manger du porc, mettre une mini jupe, etc. Mais tant que nous ne faisons de mal à personne, nous réclamons le droit de vivre comme nous l’entendons. Quel mal les homosexuels font ils donc ? Et à qui ?

Si nous n’aimons pas certaines choses, ne le faisons pas, personne ne nous obligera à les faire. Mais si d’autres choisissent de le faire, sans que cela cause du tort à autrui, quel mal y a-t-il à cela ? Nous aimons notre liberté, respectons celle des autres.

 

Ceci est le troisième article d'une série. Retrouvez les autres articles

- première partie => http://mebene.over-blog.com/article-de-l-homophobie-dans-la-societe-camerounaise-1-47314672.html

- deuxième partie => http://mebene.over-blog.com/article-de-l-homophobie-dans-la-societe-camerounaise-2-47314911.html 

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