Philosophies quotidiennes de KINI Max: A quelque chose malheur est bon...
02 mai 2011Amies Kiniennes,
Amis Kiniens,
Bonjour,
On dit quoi ? Pour moi c’est terrible. Les pluies diluviennes de Douala ont encore frappé. Du coup comme les canalisations de mon quartier sont mal faites (il n’y en a pas, à vrai dire), tout est inondé. Nous qui habitons le sous-quartier (pour moi c’est provisoire, je traverse juste une petite passe difficile financièrement parlant) pouvons très difficilement rejoindre la route. Moi je n’ai pas appris à nager dans les eaux boueuses. Et je ne suis pas le seul. Du coup, on a vu fleurir une nouvelle profession : les passeurs. Ces jeunes qui ont fabriqué des radeaux de fortune et qui, les pieds dans la fange, transportent des passagers bien au sec. Moyennant rétribution bien évidemment. Vous comprenez alors le proverbe du jour : A quelque chose malheur est bon ! Pour nous souffrances, malheurs. Pour eux, source de revenus tombée du ciel (c’est le cas de le dire).
A ce sujet, un grand malheur a frappé un ami récemment : Il est mort. Il fréquentait le « parrain » du quartier, celui qui gère les business frauduleux du quartier. Et dans les quartiers populaires comme le notre, il y en a, des business frauduleux ! Le parrain avait confié à mon ami Luc, une importante somme d’argent. Sauf que l’argent a miraculeusement disparu. Quand le parrain demande à Luc de lui rendre son argent, celui-ci ne répond pas. A bon droit car il était muet. Le parrain a l’idée d’appeler un traducteur en langage des signes, Kammo. Le gars vient. Le parrain demande à Luc « Où as-tu mis mon argent, tu vas me le dire tout de suite ». Luc répond « Non » de la tête. Tout le monde comprend, pas besoin du traducteur. Le parrain s’énerve et il hurle (on pouvait voir les veines sur son cou) « où as-tu mis mon argent, réponds, sinon je vais te découper les testicules vivant et les donner à manger à mon chien, ensuite je te couperai les oreilles, la langue, et t’arracherai les yeux avant de te trancher la gorge ». Luc s’affole et il fait plein de signes, on sent qu’il dit beaucoup de choses. Moi-même qui suis un peu novice dans le langage des signes (en tant qu’intellectuel de haut niveau, c’est normal de s’intéresser aux langues étrangères), je crois comprendre qu’il parle de cimetière, de trou entre deux tombes, celle de Mbangue et une autre. Je crois comprendre cela mais j’ai dû me tromper car Kammo, chargé de traduire répond « Il a dit que tu n’oserais pas lui faire tout ça, et que tu n’es qu’un gros lâche ventripotent incapable de satisfaire une femme». Le parrain n’a rien dit, il nous a demandé de sortir. Tous sauf Luc. Et son chien. Peu de temps après, on a retrouvé Luc, émasculé, sans oreille et sans yeux.
Le jour de son enterrement, j’ai pu voir au cimetière que la terre avait été fraichement retournée entre deux tombes, dont une d’un certain Mbangue. Entre temps Kammo s’est acheté une voiture, il dit qu’il a hérité d’un oncle.
C’est comme ça la vie, le malheur des uns faisant le bonheur des autres. Ce qui veut dire que le même évènement peut à la fois être un bonheur et un malheur, bref est inclassable car tout dépend du référentiel. Et parfois même pour le même individu, on ne sait même pas si le même évènement est un bonheur ou un malheur. Je pense que tout dépend du moment de référence. Lisez plutôt
J’ai un autre ami qui s’appelle Chaplin Nomen. Il aime bien expérimenter de nouvelles choses, comme on dit chez nous, les choses des Blancs. Un jour donc il vient me dire qu’il va piloter un avion de loisir pour la première fois tout seul, cela faisait quelques temps qu’il suivait des cours. Le lendemain, on vient me dire qu’il est hospitalisé et qu’il souffre de nombreuses fractures. Je vais lui rendre visite et il me raconte.
« Gars, figure-toi que tout se passait bien, j’avais atteint ma vitesse de croisière à 1000 mètre d’altitude, quand tout à coup, malchance ! Le réacteur tombe en panne, et l’avion commence à piquer du nez. Heureusement, j’ai vraiment beaucoup de chance, je tombe sur un parachute. Je l’enfile et je saute. A 60 mètres du sol, je l’actionne, et re-malchance, il ne marche pas. Mais ma bonne étoile était là, je vois que je me dirige vers une botte de foin qui va amortir ma chute. Et là, catastrophe, je vois qu’il y a une fourche plantée au beau milieu de cette botte de foin avec ses dents qui m’attendent pour me déchiqueter. Et là, énorme coup de bol, je rate la botte de foin, et je tombe juste à côté, d’où mes multiples fractures. J’ai vraiment beaucoup de chance, je me demande si je ne suis pas cocu, ah ah ah ».
A ma connaissance, il était effectivement cocu. Je connaissais très bien son épouse…
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