Maki est à son bureau quand entre une jeune fille, visiblement bouleversée. Il s'agit de Pascale. Maki la reçoit...

 

-          Bonjour ma chère

-          Bonjour Maki.

-          Dis-moi tout, qu'est ce qui ne va pas ?

-       Je suis triste car je me sens si impuissante. Je viens de voir une femme qui mendiait avec un bébé malingre dans les bras. Je leur ai donné le billet qu'il me restait, mais ça ne suffira même pas à ce qu'ils mangent convenablement ce soir. Et demain, comment feront ils ? Ça me fait si mal au cœur.

-       Je vois, tu es bien bonne. Vois-tu, je pense qu'il est important que tu saches qu'avec tes modestes moyens, tu ne peux pas éradiquer la misère du monde. Je veux dire, même si tu avais donné suffisamment d’argent pour la nuit et le lendemain, que se serait-il passé le surlendemain ? Et même si tu arrives à subvenir à ses besoins pour le restant de ses jours, quid des autres dans sont cas ? Il y en a des millions, voire des milliards. Tu le sais non ?

-         Je me doute bien

-          Alors, il ne faut pas t’en vouloir, ou en être affligée. En termes de souffrances globales de l’humanité, même si tu ne lui avais rien donné, cela n’aurait rien changé. Mais tu lui as donné. Tu peux te dire qu’elle voit au moins une centaine de passants chaque jour, et si chacun lui avait donné comme toi, elle roulerait sur l’or. Donc tu n’as pas fait rien.

-         Mais n’est ce pas égoïste de voir les choses selon ces points de vue ? Je suis chrétienne moi. Et ma loi chrétienne me commande d’aider mon prochain. Sans limite aucune.

-          Ah. Je vois. Tu veux que je te réponde sous le prisme chrétien ?

-          Essaie

-         Tu seras d’accord avec moi pour dire que quand on est chrétien, le modèle absolu c’est Jésus. Ce Jésus là qui est décrit dans les évangiles. Vrai ou pas ?

-          Vrai.

-      Maintenant observe les trois points suivants. Le premier étant que Jésus n’était pas intéressé par résoudre toute la misère, la famine, et les maladies de ce monde.

-          Comment ça ?

-          Parce que s’il l’avait été, il aurait résolu tous ces maux. Je m’explique. Tu sais qu’il n’a pas hésité à multiplier les pains une fois, ou à changer l’eau en vin, ou à guérir des gens par la parole (mais jamais spontanément, toujours sur demande). Tu le sais, il aurait donc très bien pu généraliser cela à tous, en tout lieu et en tout temps. Du pain et du vin pour tous, la santé et jamais tu n’aurais vu des gens mendier. Mais il ne l’a pas fait. Pourquoi ?

-          Mais, ces miracles sont peut être des allégories…

-       J’ai bien dit que je parle du Jésus des évangiles. Si ce sont des allégories, ceux qui les ont écrites n’avaient qu’à généraliser ses miracles dans leurs écrits. Ce n’est pas le cas.

-          Mais c’est pour ne pas encourager à la paresse. Il est écrit que tu mangeras à la sueur de ton front.

-       Peut-être, mais ce que j’ai dit, c’est qu’il n’était pas intéressé par résoudre tous les problèmes du monde. Et comme c’est le modèle des chrétiens, il faut donc conclure que ce n’est pas là le but qu’un chrétien doit poursuivre. Et de plus ce que tu dis est dangereux pour un chrétien parce qu’alors ça voudrait dire qu’il NE faut PAS faire de charité parce chacun doit se battre, et aider reviendrait à encourager à la paresse.

-          Ça se tient. Et le second point ?

-          Le second point est que quand on est chrétien, on peut même dans un cas, ne pas donner parce qu’on prévoit d’utiliser soi même ce que l’on a. En tant que Chrétien, tu peux donc ne pas donner sans t’en vouloir.

-          Explique-moi ça. Cela me semble étonnant

-          Ne regarde pas la paille dans l’œil de ton voisin si tu n’as pas enlevé la paille dans le tien. Ceci marche quand il s’agit de ne pas juger les autres, mais aussi quand il s’agit de s’occuper d’une personne. Jésus n’hésite pas à présenter des paraboles où le père de famille traite très différemment son fils des servants ou des étrangers. La maxime n’est jamais de dire que cela doit changer et qu’il doit donner d’abord aux pauvres. La maxime est toujours autre. Il comprend que parce que l’on a quelque chose à faire (l’école des enfants, le remboursement du loyer, etc.) on puisse dire non même si dans la poche on a cela

-          Mais le risque n’est il pas que l’on ne donne plus jamais ? Si j’ai de bonnes raisons de ne pas le faire, et que c’est légal du point de vue chrétien, je ne donnerais plus.

-          Et c'est là le troisième point. Je pense que tu t'éloignes forcément des idéaux chrétiens si cela devient pour toi un leitmotiv de ne pas donner. C'est le Jésus dont j'ai parlé qui disait aussi de donner sa tunique à qui la demande, et surtout et avant tout, d'aimer son prochain comme soi-même. Si donc tu as (une tunique ou que tu peux aider) aide ton prochain. Mais ne sois pas triste de voir la misère. Sache qu'elle existe. Fais ce que tu peux, fais ce que tu penses que tu dois, sans être égoïste. Et ni toi ni personne ne pourra t'en vouloir. Mais ne ois pas triste. C'est cela la vie.

-          Tu dois avoir raison Maki, mais ça me rend quand même triste.

-          C'est tout à ton honneur.

 

 

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