Comment arrivent ils à faire passer de telles choses, ou des injustices
02 nov. 2010
Du point de vue du tyran qui réalise une injustice
- - Bonjour Maki Avele
- - Bonjour Monsieur le président. Vous avez l’air soucieux. Qu’est ce qui vous tracasse ?
- - J’ai peur que le cas Ebene nous pose des problèmes.
- - Le petit journaliste qui vous attaquait pire qu’un opposant là ?
- - Oui. C’est vrai que tu étais en vacances. Je l’ai fait emprisonner. Et maintenant des comités de soutien se montent pour dénoncer ce qu’ils appellent « injustices ».
- - Ha ha ha ! C’est pour cela que vous êtes inquiets ?
- - Je ne devrais pas ?
- - Pas vraiment. Vous avez vu vos prédécesseurs ou vos pairs africains avoir peur de quelqu’un ?
- - Mais aujourd’hui on est en démocratie ! Et je ne peux pas tous les zigouiller comme ça.
- - La démocratie s’accorde mal des décisions arbitraires, comme celle que vous avez prise concernant Ebene. Le tout est d’en être conscient. Même si vous ne voulez pas tous les zigouiller, il y a des moyens de faire plus simples.
- - Je t’écoute.
- - Il faut savoir que ce qui motive l’homme, c’est son intérêt particulier, ou alors l’intérêt collectif dans lequel il retrouve son intérêt particulier.
- - Jusque là d’accord.
- - Si on veut donc être tranquille, si vous voulez l’être, il faut donc rendre invisible aux yeux des gens, l’éventuel intérêt qu’ils auraient à soutenir Ebene. Soit en leur fournissant d’autres préoccupations, soit en montrant que le cas Ebene ne les concerne vraiment pas.
- - Explique !
- - Pour moi, la première stratégie est dans la carotte que l’on donne aux autres. Ici, il s’agit d’occuper les gens sur leurs propres sujets, pour qu’ils n’aient pas le temps de penser au sujet qui nous embête. Par exemple si vous êtes PDG d’une boite et que vous virez une femme qui refuse de coucher avec vous, et qu’elle vous attaque aux prud’hommes ( http://mebene.over-blog.com/article-des-injustices-59346855.html ), le jour ou la semaine du procès, vous pouvez dire à vos collaborateurs qu’un contrôle interne a lieu cette semaine là, et qu’ils ont intérêt à être au carré sur leurs dossiers. Ou bien vous pouvez leur dire qu’il y a un jeu concours super important cette semaine là : celui qui aura la meilleure idée aura une grosse prime. Ou bien encore vous créez une mission super importante (où figureront les témoins de vos avances). Mission hyper stratégique qui peut sauver la boite. Bien sûr si ils réussissent, avancement rapide (juste la promesse, pour cette semaine là). Pour le cas qui nous intéresse, vous réunissez les journalistes (ils sont les plus susceptibles de réagir au cas Ebene) pour parlez de l’aide publique à la presse privée. Vous mettez les choses en débat en stigmatisant un peu ceux qui reçoivent actuellement le plus. Un peu de division ne fait jamais de mal…
- - Pas mal le premier instrument. Qu’en est-il du second ?
- - Le second instrument consiste à singulariser la victime. Je vous ai dit plus haut que l’intérêt particulier peut se retrouver dans un intérêt collectif. Il faut veiller à ce que ça n’arrive pas, en faisant bien comprendre à tout le monde, que ce qui arrive à la victime, ne lui arrive que parce que c’est elle, et ne concerne pas vraiment les autres. Par exemple en trouvant quelqu’un de sa classe (une collègue pour notre licenciée, ou un journaliste pour Ebene) qui a quelque chose contre lui, et qui pourra dire comment la victime n’est « pas bien ». En trouvant aussi une autre personne qui semble avoir fait les mêmes choses que la victime mais qui n’est pas sanctionnée. Ex : une fille qui dira que vous l’avez draguée bien avant, qu’elle a refusé, mais que vous avez été très sport. Cela n’ayant jamais nui à sa carrière. Ou un journaliste (si vous m’avez écouté depuis votre accession au pouvoir, vous avez des amis journalistes qui disent de gentilles méchancetés sur votre dos) qui vous critique publiquement. Cela permet de faire comprendre à tout le monde que le problème n’est pas là où la victime dit : vous n’êtes pas un bourreau.
- - Ok. Et le troisième instrument ?
- - Allumer des contre-feux mobilisateurs. Cette stratégie est un peu différente de la carotte. Ici il s’agit si les deux premières ne marchent pas, de créer un repoussoir collectif qui mobilisera tout le monde. Il y a deux stratégies
o Soit le repoussoir c’est un ennemi commun à vous et à eux : Par exemple, ramener sur la table le pb du voisin de l’ouest qui discute toujours la presqu’ile, ou encore s’insurger publiquement de notre voisin du Sud qui expulse nos ressortissants.
o Soit le repoussoir, c’est vous, mais sur un sujet que vous maitrisez mieux et d’où vous saurez mieux vous sortir. Par exemple, dans l’entreprise annoncez que les résultats font qu’à première vue il y aura une baisse des salaires dès le mois prochain. Vous demandez une réunion avec les syndicats de toute urgence. Bien sûr ils sauront vous convaincre. Ça marche aussi au niveau de l’Etat avec les salaires des fonctionnaires
- - Vraiment Pas mal. Le quatrième instrument ?
- - Vous apprenez à compter ? C’est tout ce que j’ai en stock.
- - C’est déjà pas mal, je dis hein Maki Avele, tu as un ancêtre italien ?
- - - Non. Mais je vais quand même démissionner, parce que je sais comment ça va finir entre nous si je reste