Salomon, la bonne mère et les élections...
20 avr. 2025A qui appartient l’enfant ? C’est la question à laquelle Salomon a dû répondre quand il a vu ces deux femmes venir devant lui. Les deux femmes réclamaient la maternité d’un enfant nouveau-né. Laquelle croire ? Salomon, dont la renommée de sagesse est issue de cette histoire eu l’idée de tester leur attachement respectif au bien de l’enfant : Laquelle préférait l’intérêt supérieur de l’enfant, même si son intérêt personnel était perdu ? En ce jour de Pâque, la question proposée aux lecteurs est de savoir si nous préférons l’intérêt de l’enfant, même si c’est à notre propre détriment…
Pour celles ou ceux qui veulent relire l’histoire de ce fameux jugement, rendez-vous dans le livre I des Rois, au chapitre 3, à partir du verset 16
3.16 Alors deux femmes prostituées vinrent chez le roi, et se présentèrent devant lui.
3.17 L'une des femmes dit: Pardon! mon seigneur, moi et cette femme nous demeurions dans la même maison, et je suis accouché près d'elle dans la maison.
3.18 Trois jours après, cette femme est aussi accouché. Nous habitions ensemble, aucun étranger n'était avec nous dans la maison, il n'y avait que nous deux.
3.19 Le fils de cette femme est mort pendant la nuit, parce qu'elle s'était couchée sur lui.
3.20 Elle s'est levée au milieu de la nuit, elle a pris mon fils à mes côtés tandis que ta servante dormait, et elle l'a couché dans son sein; et son fils qui était mort, elle l'a couché dans mon sein.
3.21 Le matin, je me suis levée pour allaiter mon fils; et voici, il était mort. Je l'ai regardé attentivement le matin; et voici, ce n'était pas mon fils que j'avais enfanté.
3.22 L'autre femme dit: Au contraire! c'est mon fils qui est vivant, et c'est ton fils qui est mort. Mais la première répliqua: Nullement! C'est ton fils qui est mort, et c'est mon fils qui est vivant. C'est ainsi qu'elles parlèrent devant le roi.
3.23 Le roi dit: L'une dit: C'est mon fils qui est vivant, et c'est ton fils qui est mort; et l'autre dit: Nullement! c'est ton fils qui est mort, et c'est mon fils qui est vivant.
3.24 Puis il ajouta: Apportez-moi une épée. On apporta une épée devant le roi.
3.25 Et le roi dit: Coupez en deux l'enfant qui vit, et donnez-en la moitié à l'une et la moitié à l'autre.
3.26 Alors la femme dont le fils était vivant sentit ses entrailles s'émouvoir pour son fils, et elle dit au roi: Ah! mon seigneur, donnez-lui l'enfant qui vit, et ne le faites point mourir. Mais l'autre dit: Il ne sera ni à moi ni à toi; coupez-le!
3.27 Et le roi, prenant la parole, dit: Donnez à la première l'enfant qui vit, et ne le faites point mourir. C'est elle qui est sa mère.
3.28 Tout Israël apprit le jugement que le roi avait prononcé. Et l'on craignit le roi, car on vit que la sagesse de Dieu était en lui pour le diriger dans ses jugements.
Les deux femmes veulent l’enfant. Il est prêt à parier qu’au départ, les deux femmes sont animées par deux sentiments :
- D’une part, elles veulent le bonheur du bébé. Qu’il se développe bien, qu’il grandisse et qu’il réussisse dans la vie : C’est l’intérêt de l’enfant
- D’autre part, elles veulent le bébé pour leur intérêt à elle : Parce que c’est un rêve, parce que cela procure une position sociale, parce qu’elles seront moins seules, parce que c’est ce que le mari ou la famille attend, parce qu’elles auront un être qui les aimera inconditionnellement, etc. Il peut y avoir mille et une raisons, et chacun définit les siennes.
Il en va de même pour chacune et chacun de nous dans les engagements louables que nous prenons
Nous faisons la charité ? C’est pour le prochain, et c’est aussi pour nous : L’image que nous avons de nous-mêmes, l’image que nous voulons que les autres aient de nous, le moyen de respecter un devoir moral, le moyen de se coucher en se disant qu’aujourd’hui on s’est bien comportés.
Nous voulons épouser une jolie fille ? C’est parce que nous nous disons que nous sommes le mieux placé pour l’aider à accomplir son potentiel, le mieux placé pour lui procurer le bonheur. C’est pour elle. C’est aussi pour nous même. Elle est gentille avec nous, elle cuisine bien, elle s’occupe bien des enfants, elle est jolie et représente bien lors des cérémonies, elle tient bien la maison et ne me fera pas honte.
Nous voulons avoir une promotion au boulot ? C’est parce que nous pensons être le plus à même d’atteindre les objectifs ambitieux que la boite attend. C’est également parce que nous voulons « avoir une équipe », être au comité de direction, être appelé « chef », avoir le salaire qui va avec, entendre notre mère dire à ses amis « mon fils a une bonne position ».
Nous voulons être le chef de notre famille ? C’est parce que nous pensons que c’est important de la garder unie, de développer l’entraide et les initiatives d’épanouissement collectif. C’est aussi parce que nous voulons être assis devant lors des cérémonies, être celui qui est convoqué par les autorités, porter le signe, le costume, qui distingue ceux qui sont chefs, de ceux qui ne le sont pas.
Nous voulons diriger le pays ? C’est parce que nous voyons son potentiel, c’est parce que nous sommes meurtris face aux souffrances des compatriotes, c’est parce que nous avons des idées concrètes pour résoudre les crises énergétiques, sociales, infrastructurelles. Nous voulons également être Président pour le pouvoir que cela confère, pour être appelé « Excellence », pour rencontrer les leaders du monde, pour l’admiration dans le regard des dames et des jeunes gens ambitieux.
Nous avons tous cette dualité. Nous oscillons entre la chèvre et le chou.
Et nous sommes du bon côté quand l’intérêt « supérieur », de l’enfant, de l’épouse, de la famille, de l’entreprise, du pays passe avant le nôtre. Et nous ne sommes pas du bon côté quand notre intérêt personnel prime. Et comment savoir où l’on se situe ? C’est ce que la sagesse de Salomon nous laisse voir : Si tu perds l’objet désiré, voudras-tu encore son bien ? La femme de l’histoire est prête à fendre le bébé en deux. Combien de prétendants éconduits diront « je te souhaite tout le bonheur du monde. Et toi, prends bien soin d’elle » ? Ne diront-ils pas plutôt « fous moi la paix, ne m’appelle plus jamais. Tu as fini de manger mon argent et tu choisis le salopard là ». Serions-nous des postulants malheureux à la promotion qui s’engageront à soutenir celui ou celle qui aura obtenu le poste ? N’essaierions-nous pas de lui mettre des peaux de banane dans les roues, ou au moins à lui souhaiter l’échec ? Je n’ai pas été choisi comme chef de ma famille ou du village, vais-je mettre le village en feu en créant des clans ou vais-je continuer à souhaiter le développement du village ? je n’ai pas été élu Président, même illégalement, vais-je mettre le pays à feu à sang ou appeler au coup d’état ?
En ce jour de Pâque, où la mort et la résurrection de Jésus symbolisent la rédemption de l’humanité, il est important de se demander si l’on est du bon ou du mauvais côté. La rédemption de l’humanité passe certes par une promesse dans l’au-delà, mais aussi et surtout un mieux vivre sur cette Terre : « Quand vous avez donné à boire à un de ces petits, c’est à moi que vous l’avez fait ». Être du bon côté, c’est ce qui fera que les enfants, les veuves et les orphelins, les familles, les villages, les travailleurs et les citoyens des différents pays vivront mieux.
En ce jour de Pâque, si nous devons être juges, soyons comme Salomon : essayons de savoir lequel des protagonistes est du bon côté. Quelle est la femme qui est prête à perdre sa vie pour le bonheur de l’enfant ? Jugeons comme Salomon. Quel est le candidat à la chefferie qui place le bonheur du village avant tout ? Choisissons le chef comme Salomon aurait fait. Quel est le candidat à la présidentielle qui est là pour son intérêt personnel ? Votons comme Salomon aurait fait…
Bonne fête de Pâque à tous…
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