Le bon Samaritain de 2024...
20 juil. 2024Qui est mon prochain ? de qui suis-je le prochain ? C’est la question existentielle de tout Chrétien, quand il est placé devant le commandement de Jésus : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même ». C’est déjà la question que se posaient les contemporains de Jésus, notamment ce Docteur de la loi qui le lui demanda. Remercions ce théologien car ce fut l’occasion pour Jésus de nous narrer la parabole du « bon Samaritain ». Et c’est ce passage que nous allons étudier ce jour…
Nous retrouvons le passage dans Luc.
Un docteur de la loi se leva, et dit à Jésus, pour l'éprouver: Maître, que dois-je faire pour hériter la vie éternelle?
Jésus lui dit: Qu'est-il écrit dans la loi? Qu'y lis-tu?
Il répondit: Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de tout ton coeur, de toute ton âme, de toute ta force, et de toute ta pensée; et ton prochain comme toi-même.
10.28 Tu as bien répondu, lui dit Jésus; fais cela, et tu vivras.
10.29 Mais lui, voulant se justifier, dit à Jésus: Et qui est mon prochain?
10.30 Jésus reprit la parole, et dit: Un homme descendait de Jérusalem à Jéricho. Il tomba au milieu des brigands, qui le dépouillèrent, le chargèrent de coups, et s'en allèrent, le laissant à demi mort.
10.31 Un sacrificateur, qui par hasard descendait par le même chemin, ayant vu cet homme, passa outre.
10.32 Un Lévite, qui arriva aussi dans ce lieu, l'ayant vu, passa outre.
10.33 Mais un Samaritain, qui voyageait, étant venu là, fut ému de compassion lorsqu'il le vit.
10.34 Il s'approcha, et banda ses plaies, en y versant de l'huile et du vin; puis il le mit sur sa propre monture, le conduisit à une hôtellerie, et prit soin de lui.
10.35 Le lendemain, il tira deux deniers, les donna à l'hôte, et dit: Aie soin de lui, et ce que tu dépenseras de plus, je te le rendrai à mon retour.
10.36 Lequel de ces trois te semble avoir été le prochain de celui qui était tombé au milieu des brigands?
10.37 C'est celui qui a exercé la miséricorde envers lui, répondit le docteur de la loi. Et Jésus lui dit: Va, et toi, fais de même.
Cet épisode se déroule sur le chemin qui mène de Jérusalem à Jéricho. Martin Luther King, qui a fait ce trajet en voiture dans les années 1960, en a parlé dans un sermon sur le sujet. Il décrit un chemin abrupt, avec plein de virages dangereux, qui même à son époque, auraient pu être des coupe-gorges. Imaginez 2000 ans plus tôt. Plusieurs heures sur un chemin aussi dangereux. C’est dans ces conditions que l’agression survint. La victime fut laissée là. Un sacrificateur, puis un Lévite vinrent à passer. Les deux virent la victime. Les deux la laissèrent là. Et c’est le Samaritain, étranger aux Juifs, peuple traité comme impur, qui vint pour sauver le blessé. Le samaritain est le prochain du blessé, et la victime est le prochain du Samaritain. Indépendamment des appartenances ethniques, religieuses, raciales, tribales, traite autrui comme tu aimerais que l’on te traite. C’est clair, et ce n’est pas tout…
Une partie de la littérature a traité du cas de ceux qui étaient censés être des modèles mais qui ont échoué, renoncé à accomplir leur devoir d’Hommes de Dieu : Le lévite et le sacrificateur.
Certains ont essayé de les excuser, en disant qu’ils n’avaient pas le droit de toucher à des corps 48h avant de pratiquer leurs offices au temple. Cela ne tient pas. Jésus n’en parle pas, et nous savons tous ce qu’il pensait des « devoirs » institués alors même que l’on négligeait son prochain.
D’autres les ont naturellement accablés, tels les pharisiens des évangiles. Mais est ce la conduite à tenir ? Quand on pense à ce coupe-gorge qu’était cette route, comment pouvaient ils être sûrs que les brigands ne se cachaient pas quelque part pour les attaquer aussitôt qu’ils se rapprocheraient du blessé ? Comment pouvaient ils être certains que la victime était une vraie victime et ne simulait pas une agression pour mieux les agresser en retour ? Et même, une fois avec le blessé, qu’allaient-ils en faire ? Etaient ils médecins ? Les auberges de Jéricho allaient leur demander combien d’argent pour garder le malade qu’ils ne connaissaient même pas ?
Autant de questions bien humaines, équivalent à celles que nous nous posons tous les jours et où nous répondons exactement comme eux :
- Des innocents croupissent en prison pour avoir voulu exprimer leurs opinions. Quoi me fait ? Tu veux que j’aille aussi marcher et je finis comme eux ?
- Des femmes désargentées sont séquestrées à l’hôpital après accouchement. Quoi me fait ? Pourquoi elles allaient faire des enfants sans argent ?
- Les routes tuent des milliers de Camerounais chaque année, du fait des épaves de la corruption et de la qualité des infrastructures. Quoi me fait ? Moi-même j’ai acheté mon permis. Si on arrête ça, on va encore se déplacer comment ?
- L’argent public dépensé dans les réjouissances, les jets privés, le carburant aurait servi utilement à l’hôpital, l’école, l’installation en eau potable qui ne fonctionne plus de nombreuses zones enclavées du pays. Quoi me fait ? Pourquoi le peuple ne se révolte t’il pas s’il est fâché ? Je veux voir mes enfants grandir
Lectrices, lecteurs, dans ces cas, et dans tant d’autres, nous sommes tels le lévite et le sacrificateur. Nous également aurions laissé là l’homme blessé. Le point commun entre eux et nous, c’est que nous nous disons, comme ils se sont dit : « Si je pars l’aider, que va-t-il m’arriver ? ». Je perdre ma vie. Le système peut me broyer. Je peux finir en prison. Je peux juste perdre mon temps, et donc mon argent, auquel cas, mes enfants vont manger quoi ce soir ? Si je pars l’aider, que va-t-il m’arriver ? à MOI. Moi qui me place au centre du monde. Ce n’est pas ce que le Samaritain a fait…
Lui, il s’est dit « Si je ne pars l’aider, que va-t-il lui arriver ? ». A LUI ! Lui que j’aime comme moi-même, selon le commandement de Jésus. C’est à ce renversement de point de vue que Jésus nous invite : Mettre l’autre, autrui, le prochain, au centre de notre action. Nous ne devons pas accepter de voir des gens mourir pour rien. Nous ne devons pas accepter de voir des gens souffrir pour rien. Nous ne devons pas accepter de voir des gens subir des injustices. Nous ne devons pas accepter de voir des gens laissés sur le bord de la route. Que va-t-il LEUR arriver ? Nous pouvons intervenir, en pensée, en paroles, par actions (y compris le bulletin de vote) et sans omission !
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