Coup d’état ou pas coup d’état ? Les militaires zimbabwéens semblent depuis près d’une semaine avoir habilement manifesté pour, si ce n’est prendre le pouvoir, du moins modifier le régime de Mugabe. Pas de violation de constitution. Mugabe toujours président. Jusqu’à son prochain départ ? Le présent article entend montrer comment ce qui se passe au Zimbabwe est une mascarade, et ce que Mugabe reste ou parte…

Depuis la prise de contrôle par l’armée, on note deux principaux types de réactions :

  • Les défenseurs de Mugabe qui ne savent pas trop quoi dire, vu que la contestation vient du Zimbabwe, et que bon nombre de Zimbabwéens euxmêmes veulent le départ de Mugabe (marche, lâchage du parti, militaires, etc.)
  • Les « démocrates », anciens (qui sur le Zimbabwe ont toujours critiqué le régime de Mugabe, c’est mon cas) ou nouveaux (qui ne peuvent pas se cacher le projet « Grace » ou qui font simplement le lien entre la longévité de Mugabe et la situation dans leur propre pays par exemple) qui sont contents que Mugabe soit sur le départ.

Mais Mugabe partira t’il ? Si dimanche 19/11 son parti l’a déposé, le même soir il semait la confusion en se maintenant  et même en se posant comme futur organisateur du congrès du même parti. Puisque son intervention a eu lieu après conciliabule avec les militaires, on pourrait penser que s’il se maintient, ce sera avec le soutien de l’armée. Mais d’autres analystes disent que son discours a violé les accords passés et selon lesquels il devait démissionner. Mais dans les deux cas, nous avons bien là affaire à une mascarade.

Les « démocrates » ne peuvent avoir des raisons d’être contents que si le départ de Mugabe entraîne une situation plus démocratique. Il faut toujours combattre des tyrannies (pour ceux qui voient/ont vu Mugabe d’un œil favorable, arrêtons-nous juste à l’évolution la plus récente du régime, que Mugabe a lui-même dénoncée dimanche soir à la TV). Mais si une tyrannie est remplacée par une autre, il convient aussi de la combattre, sans devoir regretter l’ancien régime. La question est donc de savoir si la suite proche au Zimbabwe mettra fin à la tyrannie. Et si la tyrannie continue, nous serons donc face à une mascarade.

Si Mugabe reste, il est évident que la démocratie n’adviendra pas comme par miracle. Mais il semble quand même peu probable qu’il reste. S’il part, la tyrannie cessera t’elle ? Examinons les éléments de ce que moi j’appelle mascarade

  • Le premier élément de la mascarade est le caractère partisan de l’armée. Elle est intervenue parce que Mnangagwa a été exclu du gouvernement et surtout de la ZanuPF. Ce parti pris dans les affaires internes d’un parti est tout sauf un souci de l’intérêt commun, à moins de penser que le bien commun se décide au niveau de la Zanu-PF. Cela est confirmé les développements qui voient Mnangagwa revenir à la tête du parti (et être investi candidat à la présidentielledont il a été exclu il y a peu.
  • Le second élément, qui suit le premier, est que l’armée dans son ménage des « brigands » de l’entourage de Mugabe a arrêté des gens sans jugement. Leur tort était d’être de la faction rivale. Ce sont donc des arrestations politiques, et donc arbitraires. Par l’arbitraire, on ne peut pas aller vers la justice.
  • Il convient ensuite de regarder qui deviendra le leader après tout ceci. Emmerson Mnangagwa ne semble pas être un parangon de vertu (démocratique en tout cas). Il a été au cœur de l’appareil répressif depuis des décennies, et si ce n’était sa mise à l’écart, aurait attendu les élections de l’année prochaine pour prendre le pouvoir. On pourrait me rétorquer que peutêtre a-t-il des idées différentes du vieux Bob, qu’il les appliquait par obligation, mais fera différemment une fois élu. Mais son âge déjà avancé (75 ans) et la mécanique de force mise en place pour retourner la situation (dans le parti, dans le gouvernement) semblent indiquer que pour lui, la jouissance du pouvoir passe avant tout le reste. C’est le cas de tous ceux qui pensent (même de bonne foi) « moi ou le déluge ». Le Zimbabwe ne sera pas plus démocratique avec un tel leader .
  • Mascarade enfin parce que avec ce qu’on l’on vient de voir de l’armée et de son parti pris, du candidat à venir de la ZanuPF (qui a orchestré la fraude de 2008), il est très peu probable que les élections de l’an prochain puissent être « libres et sincères ». L’opposition, encore une fois emmenée par Morgan Tsvangirai risque de demeurer une opposition. 

 

En définitive, nous assistons bel et bien à une mascarade. Mais au moins ça occupe…

La mascarade zimbabweenne...
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